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    1AS  projet 2 

    la lettre  ouverte no

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    Monsieur le ministre de l’Éducation nationale,

    Je prends la peine de vous écrire, car, lors d’un récent séjour en France, j’ai découvert votre pays et son système d’éducation. J’ai pris connaissance de ses forces et de ses défis. Par la même occasion, j’ai également pris conscience de forces et de défis de notre système d’éducation au Québec. Une des conclusions à laquelle je viens est qu’ils sont complémentaires à bien des égards. Par exemple, à mon humble avis, nous avons certainement beaucoup à apprendre sur la formation des enseignants et les perspectives d’avancement professionnel offertes par le système scolaire français. En parallèle, je pense bien modestement que le système québécois peut vous aider sur le plan de l’intégration du numérique à la pédagogie.

        Cela étant dit, je prends le temps de vous interpeler sur la question du bannissement des téléphones intelligents dans les écoles françaises. Je sais que, lors des dernières élections, votre gouvernement avait promis d’interdire les téléphones dans les écoles françaises. Et, à ce sujet, il est vertueux qu’un politicien mette en application ses promesses électorales. Or, je vous pose une question avant que vous ne mettiez votre plan à exécution dès la rentrée scolaire 2018 : si ce n’est pas l’école qui s’en occupe, qui montrera aux élèves à se servir éthiquement et avec civilité de leurs téléphones intelligents ?

    Comme vous, j’ai remarqué lors de mon séjour que les jeunes (et moins jeunes aussi !) Français sont littéralement absorbés par leur appareil portable.. Je les ai vus parler à voix haute au téléphone dans des trains bondés, au grand déplaisir de ceux qui les entouraient. Et comme vous, je m’inquiète des effets que pourrait avoir la lumière bleue sur le cycle de sommeil de nos plus jeunes, ou encore, de la cyberdépendance. Même la posture de leur cou m’interpelle !

    Cependant, il ne faut pas s’arrêter là. Justement, je pense qu’il est de notre responsabilité, en tant qu’acteurs du système scolaire, d’éduquer les jeunes à la modération dans l’utilisation de leurs appareils.

      Je crois fermement que l’école doit s’ouvrir aux réalités des jeunes et ainsi s’inscrire dans la mouvance sociale. Ses acteurs, moi le premier, doivent affronter leurs peurs, leurs inquiétudes et leurs préjugés face à l’omniprésence des téléphones intelligents dans le paysage scolaire, et ce, d’un côté comme de l’autre de l’Atlantique !

     Monsieur le Ministre, en tout respect, si vous croyez sincèrement que l’interdiction des téléphones intelligents dans le paysage scolaire est possible et même viable et qu’en plus, les problèmes potentiels liés à leur utilisation en contexte scolaire disparaitront, vous faites fausse route. Ma courte expérience et mes rencontres avec quelques centaines d’enseignants français me permettent de déduire que ces derniers seraient certainement plus disposés à éduquer leurs élèves aux réalités du numérique plutôt que de partir à la « chasse aux téléphones » dans leurs classes et à devoir exercer une constante contrainte pour appliquer votre consigne d’interdiction.

    Comprenez-moi bien : je ne fais pas l’apologie d’une intégration irréfléchie des technologies et, certainement comme vous, je pense qu’il faut faire attention avec nos plus jeunes quant à l’utilisation des technologies à l’école. Je me permets plutôt de vous proposer ceci : formez les professionnels de l’éducation et donnez-leur les outils pour qu’ils puissent intégrer judicieusement ces appareils à la démarche d’apprentissage de leurs élèves, au bon moment. Vous avez des conseillers pédagogiques extraordinaires autant dans le réseau CANOPÉ qu’à la DANE. Ils sont là pour faciliter l’intégration de pratiquement n’importe quelles technologies à l’enseignement et à l’apprentissage. Cela vaut aussi pour les appareils portatifs personnels qui, soit dit en passant, ont l’avantage de diminuer l’investissement nécessaire des collectivités et des régions. Oui, cette intégration est possible ! C’est le cas dans plusieurs écoles américaines, canadiennes et québécoises. D’ailleurs, plusieurs prennent exemple sur cette école visionnaire qui a implanté une charte d’utilisation du réseau sans-fil (wi-fi) des appareils mobiles il y a environ six ou sept ans déjà ! Oui, vous avez bien lu; pour plusieurs écoles, il n’est plus question de permettre l’utilisation contextualisée ou pédagogique des téléphones intelligents à l’école, mais bien de leur donner accès complet au réseau wi-fi !

    Je suis persuadé que vous ne souhaitez pas voir la France à la traine au plan non seulement du développement technologique et pédagogique, mais également aux plans de la citoyenneté numérique et du développement des compétences du 21e siècle chez les élèves.

        Je demeure à votre entière disponibilité pour vous partager des exemples de réussite d’intégration des technologies, autant dans notre école que dans d’autres écoles québécoises.

    Veuillez agréer mes plus sincères salutations,

    par Marc-André Girard (@magirard)
    Directeur du secondaire au Collège Beaubois
    Doctorant en administration de l’éducation
    Conférencier et auteur du livre : « Le changement en milieu scolaire québécois »

     

     

     


     

     


  • Commentaires

    1
    Vendredi 31 Janvier 2020 à 23:07

    bonne lecture

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